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Publié le Mardi 8 Octobre 2013

Retraites: "une réforme réaliste et progressiste"



Christian Hutin, Député du Nord et Vice-Président du Mouvement Républicain et Citoyen, s'exprimait à la tribune de l'Assemblée nationale dans le cadre de la discussion générale du projet de loi "Avenir et justice du système de retraites", lundi 7 octobre 2013. Voici la vidéo ainsi que le texte de son intervention.


Madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, puisque je suis le dernier orateur inscrit dans la discussion générale, vous ne m’en voudrez pas de vous faire part de mon sentiment sur cette réforme des retraites, plutôt que de vous livrer un discours convenu.

Je veux commencer par dire une chose qui n’a sans doute pas été suffisamment dite, à savoir le fait que cette réforme est une réforme de gauche.

Pourquoi est-ce une réforme de gauche ? Parce que c’est une réforme réaliste et progressiste, mes chers collègues. Clemenceau disait qu’en période de crise, la seule politique possible, c’est le réalisme. Nous sommes en période de crise, et il y a du réalisme dans cette réforme, parce que notre régime de retraite est confronté à un risque majeur.

Pourquoi cette réforme est-elle progressiste ? Parce que, des quatre réformes des retraites de ce début de siècle, c’est la première à octroyer des droits nouveaux dont vont bénéficier les femmes, par la prise en compte de la maternité, les familles soignantes et aidantes et les agriculteurs, dont Germinal Peiro a parlé tout à l’heure.

L’un de ces droits nouveaux est celui, essentiel, de la prise en compte de la pénibilité. Lors de la précédente législature, j’ai été membre d’une mission parlementaire sur les troubles psychosociaux, présidée par Mme Touraine, alors députée, et dont le rapporteur était Jean-Frédéric Poisson. Des conclusions de cette mission, adoptées à l’unanimité, il ressortait que les risques psychosociaux ne doivent pas être négligés. Le fait qu’ils soient pris en compte dans les décrets du Gouvernement constitue une grande avancée, quand on pense que, dans certains pays de l’OCDE, la notion de pénibilité est encore définie par rapport à un seuil de calories dépensées, comme on pouvait le faire au XIXe siècle, alors que de nos jours, la pénibilité ne se résume évidemment plus à sa dimension physique, mais intègre la souffrance psychique ressentie par les travailleurs – je pense notamment aux personnes faisant partie du personnel des plateformes téléphoniques, qui passent toute la journée à répondre à des appels de l’extérieur.

Par ailleurs, cette réforme est éminemment politique, parce qu’elle est critiquée par la gauche de la gauche, mais, pour prétendre à la béatification, ne faut-il pas des avocats du diable ? Je ne suis pas certain que l’intervention de Marc Dolez ait été destinée à œuvrer en faveur de la béatification de Marisol Touraine ou Catherine Lemorton mais il est permis de penser que cette réforme porte la marque d’un certain courage, car on ne peut donner ce que l’on n’a pas, et les efforts consentis à ce titre me paraissent tout à fait légitimes.

La réforme est également politique en ce qu’il existe une réforme alternative, celle que vous et vos collègues proposez, monsieur Mariton, consistant à porter l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans et la durée de cotisation à 44 ans – une réforme quelque peu brutale et qui ne serait pas forcément comprise par les Français.

Je terminerai en abordant la question des fonctionnaires, une catégorie de travailleurs si ce n’est stigmatisée, du moins souvent mise sur la sellette en commission. Sur ce point, je me souviens d’une histoire que m’avait racontée Albert Denvers, député de Dunkerque jusqu’en 1993, comme je le suis moi-même aujourd’hui, et auquel le nombre de mandats qu’il avait effectués depuis 1956 valait un grand respect dans cet hémicycle. Dans les années 1970 et 1980, alors que les EPCI venaient d’être créés, il était confronté à d’énormes difficultés pour trouver des fonctionnaires disposés à travailler au sein de ces structures. Quand il faisait le tour de ses connaissances dans le but de recruter des candidats potentiels, les jeunes auxquels il s’adressait, comme leurs parents, lui répondaient invariablement qu’ils préféraient travailler chez Usinor ou au port de Dunkerque. Dans ces années-là, devenir fonctionnaire ne faisait pas forcément rêver. Certes, les temps ont changé – « O tempora, o mores ! » –, mais ne perdons pas de vue que les fonctionnaires qui partent à la retraite aujourd’hui ne se sont pas engagés dans leur carrière en pensant en tirer un quelconque privilège.

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