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Publié le Jeudi 1 Décembre 2016 par

Langues régionales : non à la balkanisation !



Intervention de Jean-Luc Laurent, président du MRC et député du Val-de-Marne, à la tribune de l'Assemblée nationale dans le cadre de la proposition de loi Promotion des langues régionales, mercredi 30 novembre 2016.



Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, je sais que mon intervention a déclenché beaucoup d’angoisse, mais pour ma part, j’aborde cette discussion avec beaucoup de sérénité. En matière de langues régionales, en effet, le bilan du quinquennat est excellent.
Le bilan est excellent, je le répète, et l’essentiel a été fait : l’enterrement que demandaient les députés du mouvement républicain et citoyen de la ratification de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires par nos collègues sénateurs.

Chassés par la porte, les promoteurs des langues régionales ont saisi chaque occasion de revenir par la fenêtre, qu’il s’agisse de la loi de refondation de l’école de la République, de la loi NOTRe, ou de la loi sur l’enseignement supérieur.

Après avoir examiné minutieusement la proposition de loi de nos collègues socialistes et écologistes et pris connaissance des travaux de la commission, je suis prêt à convenir avec eux qu’il s’agit d’un texte de très faible portée législative – presque infralégislative.
Mais je refuse qu’on le présente comme un texte de consensus et d’équilibre. Je refuse cette vision tendant à enregistrer une pression sociale, politique et locale, et à canaliser celle-ci par des arrangements et des compromis, en cherchant des points d’équilibre. Ce n’est pas cela, la recherche de l’intérêt général, mes chers collègues !

La question de la langue est une question politique majeure qu’il faut aborder avec des principes et avec une ligne politique. Les principes sont simples : ils sont inscrits dans les articles de la Constitution. Ainsi, à l’article 2 : « La langue de la République est le français » ; à l’article 75-1 : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».

La ligne politique doit être déduite de ces principes : rien à l’école, rien dans les services publics, aucune forme de co-officialité, mais un soutien franc aux langues régionales en danger de disparition par une politique culturelle, nationale et régionale. C’est sur cette base que nous devrions nous rassembler.

Plutôt que cette clarté, les promoteurs des langues régionales – pour reprendre le titre de la proposition de loi – n’ont pour seul souci que de franchir la ligne jaune, de violer les principes, de jouer avec la Constitution.

Quel projet politique portent les promoteurs des langues régionales ? Ils nous proposent non pas de les sauver, de les promouvoir, de les préserver, de les développer – ces objectifs, quoique discutables, sont légitimes : je ne les partage pas mais je les admets –, mais de les faire entrer à l’école et dans la sphère publique. Ils nous proposent de construire pour demain une France balkanisée et fragmentée, en commençant par ses marges géographiques et linguistiques ; une France dans laquelle les étudiants, les écoliers, les fonctionnaires ne circuleront plus facilement au cours de leur vie, parce qu’ils se poseront la question de leur identité, de leur appartenance. Oui, mes chers collègues, je ne rêve pas de cette France régionalisée et enracinée : un Français est partout chez lui sur le territoire national !

La promotion forcée des langues régionales est un projet d’enfermement pour les uns et de limitation pour les autres. Même s’ils s’en défendent, ce projet valorise l’entre-soi et, disons-le puisque tout à l’heure sera évoqué le souvenir des Conventionnels, le projet d’une France fédérale avec plusieurs langues et plusieurs lois. Nous en sommes loin mais aucun pas ne doit être fait dans cette direction. La revendication linguistique a été conçue dans les années 1970 : la France de mai 1968 avait besoin de respirer, mais de l’eau a coulé sous les ponts.

La langue est un objet sérieux. On répète trop souvent, avec Renan, que la nation est un projet. Or la nation est aussi une langue, une langue commune, une langue vivante. L’édit de Villers-Cotterêts a lancé l’unification linguistique. Cette proposition de loi est une proposition de détricotage : quelques mailles, rien de méchant. On devrait laisser passer mais je suis convaincu que le législateur, par respect pour cette entreprise pluriséculaire, doit refuser toutes les mesures qui prétendument « ne mangent pas de pain » ; elles ne seront en outre probablement jamais examinées par le Sénat – c’est un détail.

Le législateur doit se montrer extrêmement prudent, précautionneux, prendre le plus grand soin de l’héritage républicain et refuser tous ces accommodements déraisonnables qui affaiblissent la langue commune – notre langue commune, qui nous permet de faire nation et de regarder sereinement vers l’avenir.

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Jean-Luc Laurent
Président du Mouvement Républicain et Citoyen. En savoir plus sur cet auteur



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