Samedi 22 Juin 2013

Le financement de la retraite ? Un affrontement entre le travail et le capital




La création de la Sécurité sociale en 1945 conformément au programme du Conseil National de la Résistance se fit dans un contexte où le patronat et les forces de droite, affaiblis par leur comportement collaborationniste durant l’occupation, durent accepter un partage de la valeur ajoutée par le travail : aux salaires bruts
s’ajoutaient des cotisations sociales patronales en pourcentage des salaires versés.
La nation se donnait les moyens de protéger sa population. Le patronat réussit cependant à limiter cette participation sociale en faisant prendre en compte un plafond de cotisations à la Sécurité Sociale.
 
Ce plafond de la Sécurité sociale contre lequel les cadres syndiqués à la CGT s’étaient battus – ils étaient plusieurs dizaines de milliers avant la scission syndicale de 1947-servit de base à la création, la même année, de l’AGIRC qui reçut des cotisations calculées au dessus du plafond alors que l’ARRCO reçut des
cotisations calculés sur les salaires en dessous du plafond pour les cadres et les autres personnels. L’ARRCO, créée en 1961, était la réponse apportée par le patronat aux luttes sociales pour des retraites égales à 75% des derniers salaires.
L’idée de diviser le salariat au lieu de rechercher des solutions simples dans la solidarité est une constante du patronat.
 
Le taux d’appel des cotisations AGIRC minoré dès 1947, passe à 90% en 1964, 100% en 1966, 103% en 1979 et 125% depuis 1995. L’ARRCO a suivi un développement parallèle. Le problème du financement de la retraite était donc posé
depuis le début des années 1970, puisque le taux d’appel des cotisations a dû être augmenté pour permettre d’équilibrer les ressources nécessaires au versement des retraites.
 
Le patronat et ses relais politiques n’ont jamais accepté les cotisations sociales patronales. Toutes les mesures prises ces dernières années tendent à en réduire la charge, aujourd’hui par la baisse du coût du travail pour les entreprises, l’exonération de cotisations patronales, la réduction de droits acquis à la retraite par
les actifs, la réduction des pensions pour les retraités.
 
Selon Patrick Artus, « dans la zone euro, les entreprises prennent chaque année l’équivalent de 1 % du PIB dans la poche de leurs salariés en plus de ce qu’elles ont fait l’année précédente. »
 
Depuis 1993 avec les mesures Balladur, l’indexation des pensions se fait sur l’évolution du coût de la vie et non plus sur celle plus favorable des salaires, privant ainsi les retraités du bénéfice de l’amélioration de la productivité. Cela fait à ce jour entre 10 et 15% de réduction des pensions. On sait que les entreprises françaises et donc les salariés sont dans les premiers rangs du classement mondial de la productivité.

La CSG et la RDS sont venus réduire également le niveau des pensions.
 
Dernière ponction avec l’accord des organisations syndicales hormis la CGT, les pensions AGIRC et ARRCO seront réduites de 1% par an pendant 3 ans. C’est une fausse solution.

Toutes ces mesures qui pénalisent les retraités et celles qui frappent les futurs retraités n’apporteront pas de solutions durables car l’issue du problème est ailleurs.
 
Elle est dans l’accroissement des ressources des caisses de retraites et de la caisse vieillesse de la sécurité sociale. Et ce ne serait que justice.
 
Ces 30 dernières années la part de la masse salariale dans la valeur ajoutée nationale a baissé de 10% et corrélativement la rémunération du capital a augmenté d’autant. On observe la même tendance dans tous les pays industrialisés. Sont en cause les bas salaires y compris chez les cadres : des milliers d’entre eux sont au minima garanti de leur classification voire plus bas si l’on tient compte des temps réels passés au travail. Cette situation est favorisée par un niveau de chômage insupportable et non combattu réellement. En même temps les dividendes versés aux actionnaires ont explosé, tirés vers le haut par la concurrence des placements et par les exigences des fonds de pensions qui doivent abonder les retraites par capitalisation. Celles-ci montrent ainsi leur nuisance : souvent incapables de fournir des retraites convenables à leurs « clients » elles ruinent les entreprises où elles investissent.

On peut dire que le coût du capital tue le travail et la retraite.
 
Il faut donc procéder à un rééquilibrage en faisant participer les dividendes et les profits financiers aux cotisations patronales. Ce sera une mesure salutaire de rationnement des profits abusifs du capital toujours à la recherche mortifère de spéculations et de profits nouveaux.
 
Mais il n’y a pas de solutions pour financer la retraite sans s’attaquer à l’austérité qui mine la
croissance et sans créer les conditions de financement de la relance de l’emploi. Des ressources existent pour relancer des investissements dans la recherche, les développements, la formation, les services publics ; et pour augmenter les salaires. La solution est dans l’afflux de cotisations nouvelles dues à l’amélioration de l’emploi, à la croissance et à la contribution des résultats financiers.
 
Ce n’est pas le travail qui coûte qui dans notre pays, il tient la corde de la productivité mais le capital qu’il faut avoir le courage d’affronter.
 
Le Groupement des ingénieurs et cadres retraités de la métallurgie CGT.
 
Paris le 14 mai 2013 


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