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I Publié le Dimanche 10 Mai 2009 par MRC


Compte-rendu de la table ronde organisé par MRC le 17 mars 2009.


Le 17 mars dernier le MRC a organisé au Conseil régional d’Ile de France une table ronde publique consacrée à l’avenir de Cuba, cinquante ans après la révolution.

En présence d’une centaine de personnes, se sont exprimés :
-Jean-Pierre Chevènement
-Son excellence Rogelio Sanchez Lévis, ambassadeur de la République cubaine en France
-Obey Ament, chargé de l’Amérique latine au Parti Communiste français
-Janette Habel, universitaire (Institut des Hautes études d’Amérique latine)
-Xavier Declercq, responsable de l’ONG « oxfam »
-Sami Naïr, secrétaire national du MRC aux relations extérieures .

Ouverture :
Après les mots d’accueil de Marie-Françoise Bechtel, secrétaire national du MRC à la formation et à la diffusion des idées, Jean-Pierre Chevènement a ouvert la table ronde .

Il a souligné l’importance historique de la révolution cubaine. « Cuba libre » a été une promesse de libération pour de nombreux peuples. Les avancées de l’Amérique latine, la démocratisation et l’indépendance ont été tributaires de cette rupture majeure avec l’ordre antérieur. Dans un contexte difficile, l’indépendance cubaine a survécu. Les sacrifices, l’opiniâtreté que le pays a mis à survivre doivent être salués. Les perspectives nouvelles passent par une levée des restrictions mises par le sénat américain au commerce avec Cuba . Les orientations du président Obama pourront-elles avoir un effet positif ? Il faut agir pour la normalisation des relations avec Cuba : la culture, l’histoire, la compréhension des enjeux de l’indépendance nationale, tout cela sanctionne l’amitié de nos deux nations. Il reste à intégrer dans la marche du monde le potentiel immense de l’Amérique latine sur qui souffle fort aujourd’hui « le vent de la liberté ». C’est ce que rend possible le rôle héroïque de Cuba, encouragement à ceux qui veulent redresser le cours de choses.

M. Rogelio Sanchez Lévis a souligné l’importance des manifestations d’amitié envers Cuba dans le contexte actuel. Il a relevé que l’histoire de Cuba s’est forgée au 18° et au 19° siècle dans les combats. Cuba porte un projet national à caractère anti-impérialiste, une « culture de résistance » avec un souffle utopique, celui qui vient de José Marti contre le matérialisme vulgaire de l’époque. L’histoire a montré que le pluripartisme bourgeois n’a pu résoudre les défis et n’a pas empêché le coup d’état de Batista. C’est pourquoi le caractère propre de la révolution cubaine est celui d’un mouvement anti-impérialiste à vocation universelle. La patrie est l’Amérique et l’humanité, comme le montrent les 2000 soldats tués en Afrique du Sud et les 37000 coopérants cubains dans le monde. Le pays a eu à affronter des épreuves difficiles, tant externes qu’internes. Avec à l’époque l’aide de l’URSS et de certains pays européens, cette synthèse culturelle à racines populaires a pu réussir. Le pays est aujourd’hui devant des défis colossaux. Les choses sont perfectibles et « nous sommes insatisfaits » : ce qui reste à accomplir d’un point de vue révolutionnaire est plus important que ce qui l’a déjà été. Mais le pays est prêt à avancer. (lire ci-dessous l’ensemble de l’intervention au format PDF).

Contributions :
Obey Ament a tenté d’évaluer l’importance des changements dans le contexte latino-américain et leur impact sur l’avenir de Cuba. Pendant les cinquante années qui viennent de s’écouler, les Etats Unis ont envahi la République Dominicaine, ils ont participé à l'organisation du coup d' Etat qui a couté la vie au président Salvador Allende, ils ont fait la guerre contre le Nicaragua et ont occupé la Grenade et le Panama. Mais aujourd’hui l'Amérique latine s'éloigne de « la triste nuit néolibérale » (Correa).

C'est un fait significatif : le rapport des forces politiques a changé dans la région, les relations avec les États Unis changent, son hégémonie politique, idéologique et militaire est plus que jamais contestée.

Les priorités des gouvernements portés au pouvoir depuis maintenant 10 ans sont autres :
Une nouvelle démocratie: avec des droits nouveaux (indigènes, syndicaux, sociaux)et de nouvelles Constitutions qui créent des mécanismes de participation citoyenne et, comme l'a dit le président Evo Morales, se veulent des verrous pour empêcher le retour du neolibéralisme.
Une autre forme d’intégration :
En novembre 2005, la plupart des pays de la région ont rejeté l'Accord de libre échange des Amériques (ALCA) lors du Sommet de Mar del Plata.
Mais les pays latino-américains se donnent aussi les moyens pour peser avec des constructions régionales.

En 2004, les pays de l'Amérique du Sud ont créé la Communauté Sud-Américain des Nations (CASA) d’où naîtra en 2008 l'Union des nations de l'Amérique du Sud (UNASUR ) qui rassemble le Brésil, le Venezuela, l'Argentine, l'Uruguay, le Paraguay, la Bolivie, l'Équateur, le Chili, le Pérou, la Colombie, la Guyane et le Surinam. Dans le cadre d'UNASUR, un Conseil de Défense et Sécurité a été crée : il s'agit un concept propre de défense et sécurité, qui ne se veut pas une sorte de nouvelle OTAN mais veut être un organisme permanent de dialogue, de consultation, d'information et d'évaluation face aux situations de risques pour la paix, un forum pour la recherche du consensus et la gestion des désaccords.

Cuba, avec le Venezuela, la Bolivie, le Nicaragua, le Honduras et la Dominique participent à l' Alternative Bolivarienne pour l'Amérique latine (ALBA) qui se donne pour objectif la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, la compensation des asymétries existantes entre les pays membres, la création de fonds compensatoires, le développement endogène.
Cuba a beaucoup à apporter à l'intégration régionale

En décembre 2008, à Saiupe ville brésilienne, a eu lieu le premier Sommet de l'Amérique Latine et des Caraïbes qui a rassemblé pour la première fois tous les pays latino-américains avec l'absence des deux fidèles de Washington, Le Salvador et la Colombie.

Les Etats Unis n'ont pas été invités alors que Cuba, représentée par le président Raul Castro occupait la place qui est la sienne parmi des nations sœurs.

Le Groupe de Rio, l'un des plus anciens mécanismes régionaux de concertation politique, s'est réuni aussi à cette occasion pour accueillir très officiellement Cuba en tant que membre.
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Les pays de l'Amérique latine ont ainsi créé, avec la montée en puissance de la gauche, un rapport de forces qui ouvre la voie au retour de Cuba dans des institutions régionales nouvellement créées.

En 1962, Cuba avait été expulsé de l'Organisation des Etats Américains par les Etats Unis avec la complicité de la quasi totalité des pays latino-américains.

Aujourd'hui, le processus d'intégration imaginé par les gouvernements de gauche ne peut pas se faire sans l'incorporation des potentialités offertes par Cuba; ses richesses naturelles, ses apports en matière d'éducation et santé, sa biotechnologie et surtout sans l'autorité politique et morale que sa révolution représente dans le monde.

Le renforcement de l'autonomie politique de la région permet ainsi la contestation de l'hégémonie étatsunienne .

L'hégémonie des Etats Unis est plus que jamais contestée dans la région :contestation de l’attaque du territoire équatorien par la Colombie et du soutien des Etats-Unis, soutien au gouvernement démocratique d'Evo Morales lors de la tentative de coup d'État civil en Bolivie soutenu par les États Unis

Enfin, la volonté des pays latino américains d'accompagner les changements en cours à Cuba et de desserrer le blocus se matérialise par de nombreux faits. Ainsi des centaines d'accords ont été signés entre les différents pays et Cuba .

Avec le Brésil qui ne cache pas son intention de de devenir son premier partenaire commerciale, place occupé jusqu'ici par le Venezuela :

En décembre 2008, lors du voyage du président Lula à La Havane, 10 accords de coopération ont été signés et des investissements ont été proposés dans des secteurs tels que les infrastructures, mines, l'informatique, la santé être les finances, la pêche, l'agro-industrie. Le Brésil veut aider Cuba à créer un parc industriel compétitif.


Avec le Venezuela : principal partenaire commercial (3 milliards de dollars d'échanges sans compter investissements) le Venezuela apporte aussi, dans le cadre de la coopération énergétique, 100 mil B/J de pétrole en échange des services médicaux dispensés par des milliers de médecins cubains.

En 2008, 76 projets pour un coût de $1,3 mds ont été signés, puis en décembre 2008, lors du voyage de Raul Castro à Caracas 311 accord ont été souscrits avec une valeur de $1,5 mds. Ils concernent le développement industriel, la santé, l'éducation, la culture, le sport, les technologies, l'agriculture ainsi que des investissements pour la production de ciment, essentiel pour la reconstruction des zones dévastées par les ouragans de 2008.


Avec l’Argentine : Christine Kirchner fait partie des Chefs d'État qui se sont rendus ces derniers temps à Cuba. Elle aussi a été accompagné de 40 chefs d'entreprise
Avec l'Uruguay : les exportations uruguayennes ont augmenté de 300% celles de Cuba de 68%. des coopérations existent dans le domaine de la santé, ophtalmologie ainsi que des accords commerciaux.

Avec l’Équateur : en janvier 2008 , 9 accords signés : éducation, culture, énergie, sciences et technologies.

Avec le Chili: la visite de Michèle Bachelet est politiquement importante, elle montre un changement de la position prise par Santiago qui s'était associé aux pays qui avaient sanctionné Cuba au sein de la Commission des Droits de l'Homme dans un passé récent.


Avec le Panama : dont la Cour suprême de Justice a annulé la grâce accordée durant le gouvernement précédent au terroriste Posada Carriles, auteur de divers attentats contre Cuba et un de ceux qui avaient planifié un attentat contre le président Fidel Castro lors d'une visite au Panama.

Enfin des pays comme la Colombie, fidèle allié de Washington, ont de bonnes relations avec Cuba. Le Mexique dont le nouveau président, Felipe Calderon a fait le choix de reprendre des relations de respect avec CUBA et a soutenu l'intégration de Cuba au Groupe de Rio.

A l'OEA on évoque de plus en plus la nécessité de faire revenir Cuba dans son sein mais le gouvernement cubain rejette l'offre et préfère plutôt s'associer aux nouvelles dynamiques d'intégration progressiste en cours.

La nouvelle administration des Etats-Unis a déjà pris des décisions qui modifient celles prises par George W. Bush. Les voyages des familles sont facilités et peuvent avoir lieu une fois par an au lieu de une fois tous les trois ans, la durée des séjours, était de 14 jours, est désormais illimitée et les voyageurs pourront dépenser jusqu'à 179 dollars par jour (50 dollars par jours jusqu'ici). Les réglementations concernant l'exportation de médicaments et aliments ont aussi été assouplies.

Mais ces changements sont plus que limités. Hillary Clinton a déjà fait savoir que la levée du blocus n'est pas envisagée par l'Administration Obama.

Les processus politiques en cours dans cette région du monde montrent bien que les Etats Unis auront face à eux un bloc de pays de plus en plus uni politiquement. Changer de politique est aussi prendre en compte cette réalité et renoncer aux tentatives de changer le cours des évènements par des ingérences et violations au droit international, comportements habituels de Washington.

L'affirmation d'une identité latino-américaine, la poursuite de l'intégration régionale, ne peuvent se faire sans Cuba, sans ses potentialités économiques et humaines bridées jusqu'ici par le blocus et le harcèlement politique.

Une relation respectueuse entre les Etats unis et ses voisins ne peut s'imaginer alors que l'un des membres de cette communauté latino-américaine souffre cette politique injuste et anachronique. (lire ci-dessous l’ensemble de l’intervention au format PDF).


Janette Habel a présenté une analyse des défis internes. Elle a relevé d’abord que Cuba vivait dans un environnement mondial en crise mais où pèse encore l’embargo américain.
Les éléments les plus importants pour analyser la situation interne sont les suivants:
-les difficultés économiques importantes ne sont toujours pas surmontées
-la société a acquis depuis la révolution une sensibilité égalitaire qui est aujourd’hui fortement ancrée ; or cette sensibilité a été heurtée par les réformes économiques faites durant la « période spéciale » qui a suivi l’effondrement de l’URSS et qui ont conduit à creuser des inégalités sociales sans qu’aujourd’hui le niveau de vie de 1989 ait été retrouvé et alors que le niveau d’homogénéité sociale a également régressé. Raul Castro a indiqué que des « changements structurels » étaient nécessaires et souligné l’insuffisance des salaires ce qui a suscité beaucoup d’espoir dans la population mais ces changements tardent à se réaliser.
-la fracture générationnelle est très forte: les jeunes de 20 ans n’ont connu que des difficultés matérielles et ils ont des aspirations non satisfaites (voyages, accès à Internet). Il y a de nouvelles exigences de la part d’une société civile émergente d’autant que les vingt ans écoulés depuis la chute de l’URSS et la rupture des échanges avec Moscou ont été très durs.

Il y a un débat dans le pays sur la nature des changements à apporter : faut-il s’en tenir à l’économie de commandement qui manque d’efficacité et qui n’est pas suffisamment productive, avec 55% de terres non cultivées alors que le pays est fertile ? Comment répondre simultanément aux défis politiques : les institutions ont été taillées pour Fidel Castro, des adaptations sont donc nécessaires alors que la génération historique qui a fait la révolution va disparaître. Comment passer de la légitimité révolutionnaire à une légalité institutionnelle ?

Il y a à Cuba de nombreux débats, largement ignorés ici. Dans la perspective du Congrès du Parti communiste cubain qui devrait se tenir à l’automne 2009, des intellectuels, des militants s’interrogent sur les raisons de l’effondrement de l’URSS. On analyse les problèmes du socialisme réel. Il y a de nombreuses discussions d’écrivains et d’artistes depuis le Congrès de l’UNEAC (Union des écrivains et artistes). C’est un débat ouvert. Il y a même eu une « guerre des courriels » pour demander la révision des politiques passées de censure culturelle, qui a débouché sur une synthèse critique qui a été publiée. Ces débats font apparaître des aspirations à plus de démocratie : participation, autogestion, possibilité de discuter et de critiquer. Raul Castro a lui-même appelé au débat mais la révocation sans explication satisfaisante de plusieurs dirigeants comme Carlos Lage (ex-premier ministre de fait) et Felipe Perez Roque (ancien ministre des Affaires Etrangères) ont rappelé les méthodes du passé. Les relations avec l’Amérique latine et notamment les pays amis (Venezuela, Bolivie, Equateur, mais aussi Brésil) et la réponse à apporter aux premiers gestes du président Obama font l’objet de discussions. Des sensibilités différentes s’expriment même si le front anti-impérialiste est maintenu sous l’œil vigilant de Fidel Castro toujours présent.

Quant aux problèmes économiques, on sent que plusieurs voies s’ouvrent entre lesquelles le nouvel exécutif n’a peut-être pas encore tranché : une voie à la vietnamienne ou à la chinoise avec forte ouverture économique sans ouverture politique, une voie qui serait un statu quo un peu aménagé avec des réformes graduelles et une voie empirique privilégiant la libéralisation du petit commerce et le développement des PME ainsi qu’une ouverture démocratique. Il n’y a pas de courants politiques clairement identifiés mais la société cubaine, du moins ses intellectuels et ses responsables politiques, réfléchissent à l’après-Fidel.


(lire aussi l’article de J. Habel dans le Monde diplomatique de janvier 2009 : « Cuba en quête d’un modèle socialiste renouvelé » et sa contribution au numéro exceptionnel de l’ « Humanité consacré à Cuba, 3 avril 2009).


Xavier Declerq, après avoir présenté l’organisation « Oxfam »qui s’attache à favoriser des coopérations équitables, a présenté le bilan de la coopération Union européenne-Cuba et posé la question de l’avenir de cette coopération.

Si de 1990 à 1996, cette coopération a été d’environ 11millions d’euros, une « position commune » sur les relations UE-Cuba, arrêtée en 1996 sous l’influence des Etats-Unis et de JM Aznar, a fait des droits de l’homme le préalable à la coopération d’où la définition d’une politique conditionnelle fondée en quelque sorte sur l’idée du changement par la carotte. C’est l’époque de la loi Helms-Burton votée par la Sénat américain et qui tend à pénaliser les Etats qui ne « respecteraient » pas le blocus imposé à Cuba. Le pays ayant survécu au blocus américain, on a recherché son externalisation par une loi extra-territoriale qui est à peu près sans équivalent dans le droit international. L’UE devait d’ailleurs accepter en 1998 la loi extra-territoriale.

Dans ce contexte, les caractéristiques de la coopération Europe-Cuba sont aujourd’hui :

-une coopération qui repose sur les ONG et non les institutions
-un planning national établi par les autorités cubaines, outil intéressant et très utile qui clarifie les modes et les secteurs d’intervention et montre que la coopération est d’autant plus efficace qu’elle s’adresse à des structures organisées
-un apport local beaucoup plus important que dans d’autres pays (infrastructure, services) et qui représente 80% de l’apport total
-une coopération Sud-Sud de grande ampleur avec plus de 35000 médecins cubains dans différents pays du monde ainsi que de nombreux éducateurs. De plus de nombreux pays d’Amérique latine viennent rechercher des formations sur place. Tout cela a servi à casser l’isolement
-une société civile très organisée et qui sait bien ce qu’elle veut : plans gouvernementaux organisés avec les organisations de masse, comités communaux
-une formation élevée : pas besoin d’envoyer des experts ou des techniciens
-des tentatives de la part des Etats-Unis de travailler le pays de l’intérieur à l’aide d’ONG ou d’églises ; mais l’Etat, informé de ces pratiques, est vigilant et els combat efficacement

On peut noter une tendance à se méfier des ONG (on ne savait pas ce que c’était)

Au total la coopération avec Cuba est une des plus durables alors même que l’UE non seulement n’a pas accru sa coopération mais l’a arrêtée en 2003.
Aujourd’hui, un dialogue s’est engagé en vue de liquider les sanctions, en anticipant sur ce que sera sans doute la politique US. C’est dans ce contexte que le commissaire Louis Michel, favorable au retour à la coopération, appuyé par Zapatero, a engagé des discussions avec Cuba dont le ministre des affaires étrangères s’est rendu fin 2008 à Bruxelles. Il reste en Europe des réticences, notamment chez les pays de l’Est mais aussi les Pays-Bas, la Grande-Bretagne et la Suède. On peut penser que le problème se reposera en 2009 avec les présidences tchèque puis suédoise de l’Union. L’année 2010 devrait offrir des perspectives meilleures avec la présidence belge. (lire aussi les articles et contributions publiés sur le site Gruposur)


Conclusion :
Sami Naïr a d’abord souligné la « nécessité de Cuba ». Sans Cuba, a-t-il-dit, il n’y aurait pas eu Lula ni Chavez. Ce qui n’empêche pas qu’il y ait aussi une relation dialectique entre l’Amérique latine et Cuba avec la question de la transformation, de la réforme des structures à Cuba. La question du passage à la légalité institutionnelle à Cuba ne passe pas par la rupture.

Le symbole de Cuba est celui du sacrifice pour une cause, idée qui chez nous n’a malheureusement plus de vie. Sans l’intervention de l’armée cubaine en Namibie, l’Afrique du Sud de l’apartheid n’aurait pas disparu. Cuba a formé des milliers de combattants du Vietnam ainsi que de nombreux cadres de l’OLP. C’est cette action dont on veut tenter de détruire l’image. De même, cas exemplaire, celui du Che, aujourd’hui victime d’une hostile campagne médiatique.

Derrière tout cela, il y a une véritable volonté d’éradiquer l’expérience cubaine. A Cuba, derrière la révolution socialiste et l’anti-impérialisme, il y a une révolution beaucoup plus profonde et d’ailleurs unique : Cuba est la première nation d’Amérique latine qui pratique une intégration totale de ses citoyens. Ni le Brésil, ni la Bolivie, ni le Venezuela, en dépit d’efforts considérables, n’en ont fait autant. Le premier décret pris par Fidel mettait fin aux « enfants naturels », rendant par là légitimes les créoles et les Noirs. Le peuple cubain n’acceptera pas de revenir sur tout cela. Malgré une guerre de 50 ans, qui a été totale et impitoyable, Cuba perdure. La République est au-dessus des ethnies, des confessions et même des idéologies. C’est ce concept que nous avons formé ici en France que Cuba met en pratique. Nous mesurons l’effort colossal que cette entreprise volontariste demande et c’est pour cela que Cuba a droit à notre admiration et à notre solidarité.

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I Publié le Mardi 5 Mai 2009 par MRC

Mots-clés : henin beaumont

Communiqué de presse, mardi 5 mai 2009.


M. Dalongeville n’a fait qu’un bref séjour au Mouvement des Citoyens qu’il a quitté rapidement après avoir été élu maire d’Hénin-Beaumont en 2001.

Aujourd’hui, le Mouvement Républicain et Citoyen présidé par Jean-Pierre Chevènement n’est engagé d’aucune manière par le vote d’élus qui l’ont quitté. Le MRC rappelle qu’il a publiquement appelé à soutenir Marie-Noëlle Lienemann comme première adjointe au maire.

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I Publié le Dimanche 19 Avril 2009

Mots-clés : pêche

par Christian Hutin, Député du Nord et Maire de Saint Pol sur Mer.


Que veulent-ils ? Vivre de leur travail. Il n’y a là rien de scandaleux mais au contraire quelque chose de normal et d’honorable.

On peut contester le mode d’action à savoir le blocage des ports qui dans cette période de crise représente pour de nombreux salariés portuaires ou transporteurs, une activité vitale. Mais comme ils le disent eux-mêmes : "nous ne voulons pas empêcher nos copains de travailler".

Les marins pêcheurs qui sont des artisans, ne sont pas les pilleurs de la mer qu’on veut nous faire croire. Ils ont au contraire un grand sens des responsabilités et leur décision de lever le blocus en est la preuve. C’est dans ce sens que je suis intervenu à de nombreuses reprises ces derniers jours auprès du ministre de la pêche et de l’agriculture.

Comment ne pas comprendre leur amertume, voire leur colère quand ils ne peuvent plus aller en mer, tandis que d’autres flottilles étrangères viennent travailler sous leurs yeux au large de Dunkerque, prélever la même ressource ?

Les artisans pêcheurs de Dunkerque on un quota de 132 tonnes, nos voisins des Pays Bas de 10 500 tonnes !

Nous sommes tous d’accords pour préserver la ressource et le stock de poissons, mais il faut comprendre que les marins pêcheurs sont, pour nombre d’entre eux, au bord du gouffre et que de la colère au désespoir il n’y a parfois qu’un petit pas.

Le gouvernement doit bien sûr prendre ses responsabilités et l’Union Européenne les siennes. A moins qu’on ne veuille la disparition de la pêche artisanale française.

Notre position de départ pour les négociations avec toutes les forces de gauche y compris le Parti Socialiste était centrée autour de trois grands axes :


1) une mondialisation régulée,
2) une Europe sociale qui protège,
3) une Europe acteur stratégique et solidaire dans un monde multipolaire.

Nous n’avons pas eu de discussions de fond avec le Parti Socialiste. En revanche, nous avons eu plusieurs rencontres avec le Front de Gauche, d’abord en présence du Parti Communiste et du Parti de Gauche, puis de ces deux forces et la Gauche Unie de Christian Picquet, en fin de négociations.
Ces trois mouvements se sont mis d’accord entre eux et, dans les discussions, nous ont opposé un front commun.

1) Sur la mondialisation régulée : nous avons plaidé pour une analyse sérieuse de la crise mondiale dont les Etats-Unis constituent l’épicentre et la principale cause. Nos interlocuteurs ont d’abord refusé de mentionner les Etats-Unis puis ils ne l’ont accepté qu’au détour d’une formule vague.

Ils n’ont pas non plus accepté d’intégrer la notion de régulation, arguant que leur objectif n’était pas de réguler le capitalisme.

Nous avons fait des propositions très précises (qui se trouvent dans notre texte originel) sur la réforme du FMI, les activités de la Banque Mondiale et l’O.M.C. Aucune de nos propositions n’a été retenue. Les déclarations relatives à la situation internationale comme aux institutions internationales se contentent de dénonciations et ne proposent en réalité strictement rien de précis.

2) Sur une Europe sociale qui protège : nous avons été très vivement contesté au nom de l’«identité européenne » conçue comme espace de libre échange ouvert. La critique du « protectionnisme » a été faite au nom du refus du « repli national ». Nous avons essayé de porter le débat sur le fond, mais cela fût impossible : le Parti de Gauche excipant de son fédéralisme européen (« nous sommes pour une Assemblée Constituante Européenne »), le Parti communiste au nom du refus d’un espace européen qui serait fermé au « reste du monde ». Il nous a été impossible d’ouvrir une discussion théorique sur la question.

Sur la Banque centrale : nous voulions une réforme de ses statuts et de ses missions afin de mettre l’Euro au service des européens et non comme c’est le cas actuellement au service du capitalisme financier. Refus de nos partenaires de prendre en considération cette proposition.

Nous voulions la création d’un Gouvernement Economique de la zone euro. Nos partenaires ont refusé cette proposition, sous prétexte qu’elle créerait une Europe à plusieurs cercles. Même refus, pour la même raison, de la création de « coopérations renforcées » au niveau européen.
Même refus, pour la même raison, d’un « Europe à géométrie variable ».

Nous avons proposé que le Pacte de stabilité soit transformé en Pacte pour l’emploi et la croissance. Sur la notion de « pacte », nos partenaires ont refusé au prétexte qu’il n’y aurait pas un accord européen sur cette question ; sur la notion de « croissance et emploi », ils ont également refusé au prétexte que ce serait « favoriser le productivisme ». Et ils ont introduit dans le texte final la critique du « productivisme », n’acceptant de faire référence à la croissance qu’implicitement et à travers le terme vague de « développement ».

Nous avons proposé un Traité social pour lutter contre le dumping social à l’intérieur et à l’extérieur de l’Union et fixant des critères de convergence fiscaux. Nos partenaires ont refusé et préféré la notion plus vague de « bouclier social ».

Nous avons fait des propositions en matière d’Europe de l’énergie et notamment concernant l’avenir du nucléaire de quatrième génération. Refus de nos partenaires, sous prétexte du « désaccord » entre les diverses sensibilités politiques qui constituent le Front de gauche.

3) Sur une Europe acteur stratégique et solidaire dans un monde multipolaire : nous avons proposé l’idée d’une Europe indépendante, comme acteur stratégique dans la formation d’un monde multipolaire. L’idée a été rejetée au nom du refus de l’Europe « puissance ».

Nous avons proposé un partenariat stratégique avec la Russie, l’idée a été rejetée.
Vis-à-vis de l’Afrique, nous avons proposé la remise en question des accords de Cotonou : l’idée a été abandonnée.

Sur la question des migrations, nous avons proposé une gestion des flux migratoires conforme au droit et respectueuse de la dignité des personnes, ce qui signifie en France l’abrogation des lois Sarkozy sur l’immigration. Notre proposition a été rejetée au prétexte qu’il fallait se contenter de la notion de « régularisation des sans-papiers avec une stratégie de codéveloppement ».

Nous avons proposé une conception de la construction européenne fondée sur le refus du Traité de Lisbonne et l’articulation de la Nation, comme espace privilégié d’expression de la démocratie dans le processus de construction de l’Europe. Nous avons souligné que notre conception de la Nation était citoyenne, républicaine et universaliste ; qu’elle incarne une communauté civique radicalement opposée aux communautarismes ethniques et confessionnels. Nous souhaitions voir, au titre de l’expression de notre identité fondamentale, une référence dans le texte à cette conception de la Nation. Elle nous a été refusée.

Si l’on prend les trois textes sur lesquels nous avons travaillé et notamment le dernier en date du 19 mars, on s’apercevra qu’un certain nombre de nos idées ont été intégrées, notamment sur l’analyse de la crise, mais que sur tout le reste nous avons fait d’énormes concessions. Malgré cela, nous n’avons pu aboutir. Tout semble s’être passé comme si nos partenaires voulaient rendre impossible l’Accord sur le fond. C’est dommage pour la gauche, pour l’Europe que nous voulons, pour la France républicaine.

En réalité, nos interlocuteurs ne voulaient pas d’un accord, comme en témoigne la parution dans L’Humanité du 19 mars (date de notre dernier sommet) de la liste quasi complète des candidats (voir les documents joints ci-dessous).
ccf24032009_00001.pdf Humanité 19 mars (1/2)  (430.97 Ko)
ccf24032009_00002.pdf Humanité 19 mars (2/2)  (286.02 Ko)

par Patrick Quinqueton, secrétaire national du MRC à l'Université d’été, au Projet et aux prises de position du parti.


flickr, Erminig Gwenn, licence cc
La crise financière, économique et sociale grave que nous traversons doit être l’occasion de mettre de la politique dans un débat qui, parce que beaucoup ne le comprennent pas, reste un débat de connaisseurs.


1 – Une réalité économique

La crise financière demeure. Certains établissements financiers, notamment aux Etats-Unis, sont encore en difficultés. Les banques ont augmenté les garanties qu’elles demandaient et le crédit est donc plus rare.

C’est de récession qu’il faut parler et non pas d’une croissance en baisse ou d’une croissance négative. Il est curieux que le mot ne soit que rarement employé. En 6 mois, la production a baissé de l’ordre de 2,5 % en France. Cela entraine (en positif) une baisse de l’inflation, qui était déjà faible et approche le niveau zéro.

La production automobile, traditionnellement élément important de la croissance dans les pays industrialisés qui ont une telle industrie, est toujours en baisse, malgré la « prime à la caisse », qui n’a fait qu’amortir la récession dans ce secteur.

La crise immobilière dont le lien, via le crédit hypothécaire, avec le déclenchement de la crise est évident, est importante : baisse des ventes, baisse des prix (ce qui n’a pas que des inconvénients, dans la mesure où ils avaient monté de façon spéculative). Pourtant, la difficulté de trouver un logement est plus que jamais une réalité. Les pays qui avaient développé sans retenue l’accession à la propriété (Etats-Unis, Espagne) sont à cet égard en grande difficulté.

Le nombre d’emplois supprimés est important. Il est de l’ordre de 300 000 emplois en France, et de près de 3 millions aux Etats-Unis.

Les pays traditionnellement exportateurs de biens d’équipement (Allemagne, Japon) voient leurs commandes s’effondrer. Les exportations allemandes connaissent une baisse supérieure à 30 %.


2 – Des conséquences sociales

Le chômage est en hausse. La poursuite de la tendance actuelle conduit à un chômage de 8,8 % en juin, soit une augmentation de plus de 20% du nombre des chômeurs depuis le début de l’an dernier. Le chômage partiel (heures ou jours non travaillés sans qu’il y ait rupture du contrat de travail), qui se comptait en centaines de milliers d’heures l’an dernier, est désormais supérieur à 10 millions d’heures par mois.

Le pouvoir d’achat diminue, malgré une inflation proche de zéro, du fait de l’augmentation du chômage et de la sous-activité, ainsi que de la tendance à l’épargne de précaution. Mais, comme le montre le débat actuel, les inégalités sont fortes.

Les sinistres industriels ne sont pas toujours directement liés à la récession, ils conservent une dimension de délocalisation d’activités. Si Heuliez (autocars et équipements automobile) a des difficultés directement liées à la crise, la décision de délocalisation est davantage présente pour Continental à Clairoix.

Les grandes journées d’action manifestent une unité syndicale nouvelle incluant l’UNSA et SUD en plus du cercle des cinq grandes organisations. Mais le contenu de cette unité est pour l’instant assez flou.


3 – L’intervention politique

Le discours dominant est celui de la parenthèse : une fois la parenthèse de la crise passée, tout redeviendrait comme avant. Or, c’est bien entendu une profonde transformation qu’il nous faut exiger, à la hauteur de la gravité de la crise.

Le retour de l’Etat est une donnée qu’il nous faut théoriser. En effet, l’intervention de l’Etat dans l’économie n’est pas indispensable seulement en temps de crise, c’est au contraire la crise qui met en évidence une insuffisante intervention de l’Etat, au nom de l’intérêt général, dans la régulation des activités économiques. L’Etat ne doit pas s’excuser d’intervenir dans le capital des banques, il doit en exiger la contrepartie : son mot à dire dans les conseils d’administration.

L’Union européenne est inexistante face à la crise. Pourtant, elle ne change rien à sa doctrine de fond : la concurrence plutôt que la politique industrielle, le libre échange plutôt que la protection, la marché plutôt que le service d’intérêt général. Elle met juste un (petit)bémol à certaines positions qui apparaitraient décalées (par exemple sur les aides d’Etat), mais son mandat ultra libéral n’a pas été changé.

Il existe des débats intéressants, mais mal posés et qui exigent donc une clarification politique de la part de la gauche. C’est la question de la maitrise du système économique, au nom de l’intérêt général, qui est au centre de la crise que nous traversons. Or, une telle maitrise est contestée dans sa légitimité depuis que la victoire de l’ultralibéralisme dans les pays anglo-saxons au début des années 80, puis dans le monde entier par la suite.

Il nous faut nous emparer des débats réels qui existent aujourd’hui pour transformer les débats conjoncturels en débats de fond :
- le débat sur la régulation financière : ce n’est pas seulement quelques règles de transparence qu’il faut imposer aux marchés, c’est une vraie régulation nationale et internationale de la place de la finance qui est nécessaire ;
- le débat sur la protection et les limites du libre échange : ce n’est pas seulement quelques correctifs qu’il faut apporter en s’excusant, c’est la protection contre la mise en concurrence des systèmes sociaux qui est légitime ;
- le débat sur les revenus des patrons et les « boni » des financiers : ce n’est pas seulement une question morale dont il faut se scandaliser quand la crise atteint les petites gens, c’est une nouvelle inversion de la part respective des revenus du travail et de ceux du capital qui est nécessaire ;
- le débat sur la relance montre que les Etats-Unis et l’Europe montre que nous n’en avons pas fini avec les déficits américains qui vont s’accroître : les parts respectives du soutien aux banques, aux entreprise et aux ménages doivent bouger en Europe, malgré les réticences allemandes et communautaires ;
- le débat sur les paradis fiscaux est ambigu, dans la mesure où il peut se substituer à la nécessité d’une régulation financière : or, il faut à la fois remettre en cause les paradis fiscaux et réglementer l’activité financière.

Sur toutes ces questions, la gauche est tout sauf claire. C’est pour nous l’occasion d’une intervention publique claire, au nom de l’intérêt général. La période nécessite plus que jamais de l’audace pour combattre les idées qui permettent au capitalisme financier mondialisé de s’imposer sur le ton de l’évidence.


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Président du MRC
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